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Août partie 3/3 : Cape Cod

Bon alors, je suis de nouveau complètement à la bourre sur le blog avec quasi 5 mois de retard. Les coupables sont nombreux : vacances d'hiver dans le Maine, soirées longues au boulot et le dernier en date des problèmes informatiques (le coupable a été identifié, mon disque dur avec mes photos qui est mouru...) En cours d'évaluation des dégâts. Affaire à suivre. En attendant, j'essaie d'évacuer ma frustration en repensant à nos sorties de cet été. Retour au mois d'août donc. 

 

21 août : On a pris la route vers 17h après avoir récupérer nos biscuits chez Eliza. Sur l'autoroute, les aires de repos sont fantomatiques avec l'ensemble des restos à l'intérieur fermés. On arrive de nuit après 4h de route sur Cape Cod, au milieu de l'anse à Wellfleet. Le gérant du camping nous a laissé un plan avec mon nom (enfin mon nouveau nom puisque j'ai été rebaptisé DURETO. Le camping est bien animé et on passe devant d'immenses camping cars installés là pour la saison avec des panneau Trump 2020 et le drapeau américain en néon (bon goût bonjour!). Après une bonne nuit sous les pins, on savoure un petit déjeuner à base de pain au chocolat (et non pas chocolatine ici car notre amie Eliza nous vend des petits pains au levain avec des pépites de chocolat et des noix de pécan) et de brioche maison à la confiture. On a rendez-vous à Orléans au magasin Goose Hummock pour louer notre canoë. Au programme, on remonte le bras de mer jusqu'à Town Cove avant de pagayer dans le marais de Nauset Marsh. On y croise des cormorans, goélands et mouettes, sternes, chevaliers, pluviers, balbuzard pêcheur, corbeaux, hirondelles, martin-pêcheur... Je m'essaie donc à une nouvelle discipline: la photographie en canoë. Pendant qu'Ulysse est en charge du pagayage et de la direction à l'arrière, je tente tant bien que mal de stabiliser mon objectif quand tout bouge dans toutes les dimensions. Alors que je viens de sortir mon appareil photo du sac étanche, un bateau à moteur passe dans le même canal que nous et crée d'énormes vagues qui ont tôt fait de remplir notre canoë. Heureusement l'eau n'est pas profonde mais nous voilà donc en train de vider notre embarcation en la retournant tout en essayant de ne pas faire mourrir prématurément appareil photo et jumelles dans un sac étanche porté à bout de bras. Un autre bateau à moteur s'approche de nous et nous demande si tout va bien. On lui répond par l'affirmative tout en pensant intérieurement "silteplait ne t'approche pas de nous". Sinon, le marais est très agréable avec peu de courant et beaucoup d'oiseaux. On en profite pour faire une petite pause sur un banc de sable où on observe des petits Bernard L'hermite et des sternes. On y croise également un banc de phoques. On a beau essayer de passer loin d'eux, on les a malheureusement surpris et ils ont plongés dans l'eau. Le retour du parcours est épouvantable et je pèse mes mots. Il y a beaucoup beaucoup de vent dès qu'on sort de l'abri du marais (environ 10 miles par heure soit 16 km/h ce jour là) et donc beaucoup de courant contre nous. Plus question de prendre de photos, on range le matériel et on se retrousse les manches. Malgré les bras qui chauffent vraiment très fort, impossible de prendre de vrai pause sous peine de faire marche arrière et de perdre les quelques mètres rudement gagnés. Quand on arrive enfin au ponton du magasin de location, l'employé au style de surfeur nous demande si nous nous sommes retournés tellement nous sommes trempés... Non non juste le vent et les vagues qui nous ont rincés. Il s'agit maintenant de trouver de toute urgence à manger à Ulysse qui est affamé après ces 11km de canoë.  Il m'autorise un arrêt express sur la route du camping au Salt Pond Visitor center pour essayer de récupérer des infos auprès des rangers sur les oiseaux présents et les bons spots... 

 

Une fois requinqués par une bonne dose de houmous, on repart à l'assaut des petits lacs au milieu de la forêt (Gull Pond, Great Pond) sur une piste (nouvelle session de musculation des fessiers de mon côté quand la voiture penche dans les ornières, le souvenir d'un tonneau en buggy dans les dunes de Dubai étant encore bien vif). Dur de trouver un coin pour faire la sieste (tous les spots sont soient privés soit plein de monde). On finit par trouver un petit chemin le long d'un ruisseau qui sert de canal d'oxygénation pour les harengs dans la forêt. On y croise grenouilles et petits limicoles. avant de faire une sieste sur un talus mousseux à l'ombre des sassafras. 

Notre dernier arrêt de la journée est à la réserve de Mass Audubon Wellfleet Bay Wildlife Sanctuary. Pour les lecteurs, les plus assidus du blog, j'y avais déjà été en 2018 avec ma maman et mon petit frère. L'ombre des arbres sur le chemin fait du bien après la chaleur de l'après-midi. A l'entrée de la réserve, on croise les os d'une baleine savamment disposés pour nous rappeler qu'elles évoluent au large des plages de Cape Cod. En termes d'oiseau, on croise une sittelle à poitrine rousse, des petits chevaliers qui barbotent à côté d'une balle de golfe (parfait pour donner l'échelle et se rendre compte qu'ils sont tout petits). On croise également une famille de Tyran Titri (Eastern Kingbird). Je retrouve avec joie le caillebotis qui nous fait évoluer au milieu de centaines de crabes violonistes (Fiddler crab). On passe à côté de plusieurs nids de tortues Malaclemys terrapin (Diamondback terrapin) qui sont protégés. Les plages de sables d'où la marée s'est retirée sont couvertes de milliers de petits escargots d'eau noirs. Des poteaux marquent l'élévation du niveau de la mer liée au réchauffement climatique pour montrer aux visiteurs ce que la mer grignotera en habitat pour les tortues et les oiseaux dans les prochaines décennies. 

On fait un dernier aller-retour à Orléans pour trouver de l'après-soleil à Ulysse qui a fortement rougi dans le canoë. Après une douche chaude de 5 min (top chrono, on est sur une douche à jeton) et une salade de lentilles, c'est l'heure d'aller se coucher même s'il n'est que 20h. 

Le lendemain matin, notre réveil retentit à 5h30 (c'est en train de devenir une tradition). On sort discrètement du camping pour rejoindre le parking du Great Island Trail. On savoure notre brioche sur le parking désert avant de se lancer dans le tour de cette anse qui fait une dizaine de kilomètres. Au moment où l'Amérique a été colonisée, cette presqu'île était en fait une île issue des débris de la glaciation entourés par la mer. Une deuxième île Great Beach la côtoyait. En 1831, les forces du courant ont fini par amasser une langue de sables qui connectent les îles. A l'arrière (est), des marais se sont développés. Les premiers habitants de cette îles, les Amérindiens Pononakanits vivaient d'agriculture en été et de pêche et de coquillages l'hiver. La cohabitation avec les colons se passe relativement bien jusqu'à l'épidémie de variole dans le milieux des années 1700 qui touchent fortement les  Pononakanits qui finissent par disparaitre dans les années 1800. 



Great Island est également un haut lieu de la pêche à la baleine avec des tours pour les repérer. A partir de 1800, l'ile est désertée et ses ressources sont exploitées: bois des feuillus pour les maisons et les bateaux, culture de l'huitre et de la canneberge, pâturage des chevaux, cochons et moutons. Après la mort inexpliquée des huitres et la déforestation complète de l'île, une période de restauration commence avec la plantation de Pins rigides (Pitch Pine) en 1830 pour lutter contre l'érosion. Depuis les plantes reprennent peu à peu le contrôle. Notre balade commence donc le long du marais à l'est de la presqu'île. Le marais salé est rempli d'herbacées comme les Suaeda, de salicornes (virginia glasswort). La partie sableuse est recouverte de coquilles d'huitres dans lesquelles des limicoles (grand chevalier, courlis cour lieu et chevalier semi-palmé) fouillent la vase de leurs becs pour se nourrir au côté des goélands. Au milieu des coquilles d'huitres noires, les éponges rouges (Clathria) égayent le décors. On franchit le cordon dunaire le temps de jeter un coup d'oeil à la plage plus classique de l'autre côté. Sur la dune, de jolies herbacées bleu-gris (Armoise de Steller / Hoary mugwort) alternent avec des buissons de Myrique de Pennsylvanie (Northern Bayberry) aux baies bleus-grises également prisées par les chenilles à bosse rouge (espèce de papillon de nuit, red-humped caterpillar moth). Le haut de la dune est lui couvert des Pins rigides plantés au 19ème siècle et de chênes qui gardent un peu la fraîcheur. On redescend de la dune et on se retrouve à nouveau au milieu d'un marais salé qui alterne avec des portions de plages. La marée basse a laissé des algues vertes asiatiques invasives accrochées à de petits rochers (Codium fragile, Dead man's fingers). On fait de notre mieux pour ne pas écraser les petits crabes violonistes dont le cliquetis rythme nos pas. On va quasiment jusqu'au bout de la presqu'île en dépassant le point de vue de Jeremy Point. On y trouve plein d'autres limicoles différents de ceux vu plus tôt ce matin là: Pluvier semi-palmé (semi-palmated plover), pluvier argenté et tourne-pierre à collier (ceux là sont aussi présents en France), et un pluvier siffleur (piping plover, une nouvelle espèce pour Ulysse). Evidemment au moment où je m'apprête à déclencher pour photographier un des pluviers argentés dont je n'ai pas de jolies photos, un faucon survole la plage et sème la panique. Je me console avec un crabe araignée échoué qui a une drôle d'allure. On passe à nouveau de l'autre côté du cordon lunaire pour entamer le retour vers la voiture côté Ouest cette fois-ci. J'ai bien du mal à déjeuner interrompue par les canards Eiders et les phoques qui passent au large et les bécasseaux sanderling qui trottent le long des vagues. Des tous petits poissons coincés dans les flaques laissées par la marée commencent à se faire entrainer de nouveau vers le large par la marée montante. On finit quand même par presser le pas car à 12h il commence à faire vraiment très chaud et les coups de soleil d'Ulysse de la veille n'apprécient que très moyennement. Le parking est bondé mais on trouve quand même une table de pique-nique à l'ombre qui nous sert également de base pour la petite sieste de l'après-midi. 

On met ensuite le cap sur Provincetown, la ville au bout de la corne de Cape Cod. La ville est remplie de touristes. Après avoir tourné un peu pour se garer, on se trouve avec peine un café avec un smoothie car tous les restaurants n'acceptent que les clients pour un diner complet en raison du COVID-19. On bat toutefois vite en retraite car des petits enfants s'obstinent à venir jouer à côté de nous et c'est compliqué de boite un smoothie en gardant son masque. On jette un dernier coup d'oeil au port où batifole un phoque avant de récupérer notre voiture. Ici les panneaux Trump 2020  sont pour une fois sous-représentés par rapport aux panneaux Black Live Matters et LGBTQ. 

On se dirige à nouveau vers le Sud pour aller assister au coucher du soleil au phare de Nauset (Nauset Lighthouse) et faire du repérage pour une séance photo lever du soleil sur la mer le lendemain matin. On s'arrête à Moby Dick's pour une petite entorse à notre régime végétarien avec des lobster rolls et de la lobster bisque (homard). Le temps de récupérer notre repas gourmand du soir à emporter, le phare qui était à 15min est maintenant à 45min. Cape Code a une route unique et en l'occurence elle est toute bouchée car tout le monde rentre de sa journée. On s'échappe donc sur une petite route latérale pour aller à Wellfleet harbor (Mayo Beach).  On est récompensé par des lumières incroyables après la pluie: pas mal comme décor pour déguster notre homard dans le coffre de la voiture. Le resto m'a rebaptisé Littitia B ce qui fait beaucoup rire Ulysse qui m'appellera Littitia Dureto pour le reste de l'été. Nos voisins, un couple de papi/mamie s'obstinent à laisser tourner leur moteur pendant 15 minutes alors qu'ils sont arrêtés. Le monsieur se fait ronchonner par sa mamie car il ramène une coquille de limule qui va empuantir leur voiture (c'est pas moi qui ferait ça!!). 

On finit tout de même par arriver à Nauset Lighthouse à la tombée de la nuit et on revoit quelques phoques. Ulysse mentionne que ça doit être terrifiant d'être un phoque dans le noir avec les requins autour. D'ailleurs, les requins de la zone sont tagués pour essayer de comprendre leur comportement et leur activité en fonction de l'heure, des marées, du mois... Grâce à ces études, on sait que leur pic d'activité sur la côte de Cape Cod est entre août et octobre. On fait quelques photos du phare et puis c'est l'heure de la douche et du dodo. 

Le lendemain matin, on se lève avant l'aube et c'est bisque de homard au petit déjeuner (j'ai vu un petit peu trop gros la veille, notre glacière n'est plus très fraiche et hors de question d'en gaspiller une goutte!). On arrive avant le lever du soleil sur la plage de Nauset. Il y a déjà du monde mais pas trop. Je tente quelques photos au trépied en pause longue sans comprendre pourquoi toutes mes photos semblent floues...avant de me rendre compte que mon appareil est mal fixé! Les phoques passent par groupe de 3 ou 4 tous dans le même sens devant un soleil rougeoyant. 

Bon puisque mes qualités de photographe de paysage laissent clairement à désirer, je retourne à ce que je sais faire... ramper dans le sable mouillé à hauteur d'oiseaux! je recherche donc des petits limicoles (bécasseau sanderling et pluvier semi-palmé). Alors que je me suis enfin rapprochée d'un bécasseau sanderling coopératif, un énorme nuage passe et mon cher bécasseau s'envole de l'autre côté de la plage.. Je m'entête et je me mets en tête d'avoir un de ces limicoles avec la falaise orangée du fait des rayons du soleil en arrière plan. Malgré plusieurs échecs, je finis tout de même par avoir quelques portraits dont un de pluvier semi-palmé dont je suis contente. Je me rends soudain compte que ça fait un bout de temps que je rampe dans le sable et je rejoins Ulysse dont l'estomac est en train de grogner de faim. 

On remonte tranquillement vers le parking non sans admirer un moqueur chat bien occupé à petit-déjeuner dans les baies sauvages. 

Après un petit déjeuner au camping et le repliage de la tente, on se met en route pour le retour vers Troy. On fait quelques pauses sur la route pour profiter de deux réserves Audubon au début de l'anse de Cape Code. Notre premier arrêt à BarnStable n'est pas très fructueux en termes d'observation (à part une dinde très timide) mais on est bien au frais dans la forêt. Notre deuxième arrêt à Long Pasture Audubon est plus fructueux. Déjà des bénévoles ont installés des tentes dehors avec une mini expo. On y découvre le cycle de vie du plus grand papillon de nuit des Etats-Unis: le Saturnie Cecropia (Cecropia Moth). La forme adulte (le papillon donc) n'a pas de bouche: pendant ses 7 à 14 jours de vie, il ne mange pas et ne boit pas et se contente de se reproduire pour faire plein de bébés! Ils ont aussi des toutes petites tortues peintes (painted turtle) qui font pas plus de 5 cm. On finit quand même par aller marcher un peu: on voit beaucoup de merles d'Amérique (American Robin) et de lapins mais point de papillons dans les prairies fleuries. C'est marée basse et quand on s'aventure sur le sable, il y a plein de Bernard l'hermite, des petits limicoles et un crabe. Un couple avec trois gros chiens s'obstine à prendre une photo de près du pauvre crabe qui agite ses pinces d'un air menaçant. Après un café, un chocolat chaud au caramel salé (best chocolat chaud ever ! Ariana Café) et un pique-nique sur les marches du tribunal local (courthouse), on se remet en route vers Troy vers 12h30 au son des podcasts Programme B et Invisibilia. On arrive vers 17h30 à Troy où notre jardin nous récompense de notre visite attentionnée par une multitude de légumes (les haricots sont en folie et on récolte nos choux bok choi). 

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Commentaires: 1
  • #1

    Joelle (samedi, 06 février 2021 18:10)

    on attend la suite et notamment vos vacances dans le Maine