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Août partie (1/3) : Black Mountain et opération colibri

Je vous retrouve pour nos expéditions de début août. Je vais probablement découper les mois d'août et de septembre en plusieurs articles car sinon ils risquent d'être très longs. On commence par une petite mise en jambe avec une de mes randos préférées de l'été: Black Mountain. Une petite rando assez facile avec un triton, des champignons incroyables et plein de sittelles à poitrine rousse qui accompagnent notre ascension de leurs vocalises nasales yank-yank. Au sommet, une vue splendide sur la face Nord de Lake George que l'on voit rarement lorsqu'on grimpe les montagnes autour. Notre pause déjeuner se fait cependant dos à cette vue magnifique car je nous ai trouvé un rocher à hauteur du sommet des conifères où les passereaux se posent tout près, dont un joli jaseur d'Amérique (potentiellement affairé à construire un nid??).

La descente est tout aussi agréable et nous entraine le long d'une multitude de petits lacs.

 

La petite trouvaille naturaliste du jour: la monotrope unicolore. Contrairement à ce que l'on pourrait croire, il ne s'agit pas d'une champignon mais d'une plante entièrement blanche (fleur, tige,...) car elle ne contient pas de chlorophylle. Au lieu de produire son énergie par la photosynthèse, elle parasite la relation symbiotique entre les champignons (mycorrhize) et son hôte conifère. Les sucres sont produits par photosynthèse par le conifère qui les partage avec le champignon en échange de minéraux. La monotrope récupère ainsi des sucres non par sa photosynthèse mais en les "volant" au champignon ce qui lui permet de pousser dans des sous-bois très sombres. 

 

Après cette rando, on prend les petites routes pour rentrer et on s'arrête dans les prairies du comté de Washington. On y va d'habitude l'hiver sous la neige pour chercher les hiboux des marais et les busards des marais. J'ai presque associé cet endroit à des températures glaciales. Mais pas de claquement de dents ce jour-là, on cherche plutôt l'ombre. On a beau scruté les buissons, on n'y voit ni goglu des prés (bobolink) ni Sturnelle des près (Eastern Meadowlark). 

En août c'est le retour des colibris sur le balcon. Les colibris passent l'hiver au Mexique et reviennent vers l'Est des Etats-Unis en avril. Les colibris à gorge rubis traversent le Golfe du Mexique (au sud de la Floride), sans escale sur des centaines de kilomètres et donc sans manger ou se reposer. Ils obtiennent l'énergie dont ils ont besoin en brûlant leurs réserves de graisse. Les études sur les colibris bagués ont révélé que ces oiseaux peuvent se souvenir des endroits où il y avait des fleurs ou des mangeoires les années précédentes, et retourner à cet endroit exact d'une année à l'autre.

Même s'ils sont censés être là depuis avril, on ne commence à les voir régulièrement sur notre balcon qu'à partir de début août. Alors quand nous ne sommes pas en rando, on est à notre fenêtre pour observer ces petites boules d'énergie.

 

 

Le colibri à gorge rubis bat des ailes environ 53 fois par seconde, alors que notre oeil ne peut détecter les mouvements au-delà de 50 battements par seconde d'où l'effet de flou. Non seulement les colibris peuvent voler sur place mais dans toutes les directions : tout droit, vers le haut, vers le bas, d'un côté à l'autre et en marche arrière avec l'agilité d'un drone. Ils accélèrent comme des fusées et atteignent régulièrement des vitesses allant jusqu'à 55 km/h voir 80km/h en plongée. Je vous ai pris quelques petites vidéos pour que vous puissiez en profiter comme si vous étiez dans notre salon mais c'est compliqué d'arriver à les suivre surtout au téléobjectif. 

 

 

Pour maintenir le battement de leurs petites ailes à un rythme aussi élevé, les colibris doivent brûler beaucoup de carburant.  La majorité des autres espèces d'oiseaux brûlent de la graisse pour alimenter leur vol, mais les colibris utilisent des sucres. De l'aube au crépuscule, ils passent beaucoup de temps à chercher des fleurs et à siroter dans un cercle vicieux terrible : pour voler sur place, un colibri doit battre des ailes rapidement ; pour battre des ailes rapidement, il doit avoir beaucoup d'énergie ; pour avoir beaucoup d'énergie, il doit avoir un métabolisme élevé ; pour avoir un métabolisme élevé, il doit consommer beaucoup de sucre; pour trouver et consommer beaucoup de sucre, il doit voler et battre des ailes rapidement. Alors pourquoi se spécialiser dans le sucre et le nectar de fleurs? Pour  ne pas être  en concurrence avec d'autres types d'oiseaux et disposer d'une niche écologique (l'accès à une ressource riche juste pour vous,). 

Mais alors que se passe-t'il la nuit, lorsqu'ils ne mangent pas pendant 6 à 10 heures ?  Les colibris rentrent dans une sorte d'hibernation appelée torpeur:  la température de leur corps baisse et les battements de leur cœur ralentissent. À l'aube, un colibri peut avoir perdu 10 % de son poids pendant la nuit.

 

 

Début juin, j'ai installé une sauge bleue et une Lobélie Cardinale (la fleur rouge sur les photos), deux plantes indigènes que les colibris et autres polllénisateurs aiment beaucoup avec leurs fleurs en tubules. Le terme fleurs indigènes fait référence à des plantes qui se sont développées naturellement dans une région donnée dans le temps géologique. Typiquement aux Etats-Unis, il s'agit souvent de plantes présentes avant l'arrivée des colons Européens. Ces plantes bien adaptées aux conditions climatiques locales nécessitent souvent bien moins d'entretien (y compris arrosage) et ont souvent co-évolué avec la faune locale leur apportant des ressources alimentaires parfaitement adaptées. 

Lorsqu'ils se nourrissent, les colibris plantent leur bec fin dans le tube d'une fleur et utilisent ensuite leur langue pour aspirer le nectar. Leurs langues sont super longues, fourchues et en forme de deux tubes parallèles et creux. Ces tubes s'ouvrent sur le côté pour laisser entrer le nectar, puis ils se ferment avant de revenir dans la bouche. Cette action de pompage se produit très rapidement et de manière répétée.

Sur la vidéo ci-dessous, on voit effectivement la langue du colibri!

 

Pendant la saison de reproduction, les colibris établissent des territoires qu'ils défendent contre leurs rivaux. Un colibri mâle établit un territoire qui comprend quelques fleurs productrices de nectar. Le mâle espère que les femelles entreront sur son territoire pour se nourrir de ses fleurs et qu'elles le remarqueront et s'accoupleront avec lui. On a eu plusieurs petites batailles de colibri sur le balcon pour le monopole des fleurs ou de la mangeoire. 

Une caractéristique clé du plumage du colibri est la prédominance de couleurs iridescentes. Ce sont ces couleurs d'aspect métallique qui sont les plus développées sur la tête et le haut du corps des mâles. Ces couleurs changent de teinte en fonction de l'angle sous lequel on les observe. Par exemple, de côté, les plumes du cou d'un colibri mâle peuvent sembler presque noires. Mais lorsqu'on les voit de face, en plein soleil, les plumes prennent un éclat rouge lumineux. Les mâles de cette espèce ont le cou entièrement rouge et les femelles ont le cou blanc. Mais sur les premières photos ci-dessous, vous verrez quelques éclats rouge épars sur le cou nous indiquant ainsi qu'il s'agit d'un jeune mâle. 

 

 

 Deux petites anecdotes supplémentaires sur les colibris pour la route:

  • Les colibris seraient arrivés en Amérique il y a 22 millions d'années depuis l'Eurasie.. Et oui, même si aujourd'hui on trouve des colibris uniquement en Amérique, des fossiles de colibris ont pourtant été trouvés en Allemagne. 
  • Il existe de nombreux exemples de prédation des colibris par d'énormes araignées et des mantes religieuses (même si leur prédateur principal reste le chat).

Je vous retrouve très vite pour plusieurs long-weekends de camping!

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