· 

Roadtrip Floride Partie 3

Rebonjour, je tiens à ma promesse et j'essaie de rattraper le retard accumulé sur le blog (presque 6 mois! le temps passe vite).

Aujourd'hui on va continuer notre exploration des Everglades depuis Shark Valley l'entrée au Nord. Pour cela, on se lève à nouveau aux aurores pour arriver à l'ouverture du Parc malgré la soixantaine de kilomètres qui sépare notre camping (Homestead) de cette entrée. Le voyage ornithologique commence dès le parking avec un drôle d'échassier marron et blanc en train de s'acharner sur une coquille que je regarde avec perplexité pensant qu'il s'agit d'un juvénile de quelque sorte... Mes réflexes d'ornitho du dimanche sont tellement lents et mal réveillés que quand je réalise enfin qu'il s'agit d'un Courlan Brun (Limpkin) en train de se nourrir d'escargots (sa principale source d'alimentation), celui-ci est déjà loin pour tenter une belle photo. On croise aussi de part et d'autre du parking nos premiers alligators de la journée, très furtifs. A l'entrée, les voitures s'accumulent rapidement malgré l'heure matinale jusqu'à ce que le ranger vienne ouvrir la barrière. On a choisi de louer des vélos pour la journée pour parcourir les 24 kilomètres de piste cyclable à travers les marais d'eau douce ponctués d'îlots de feuillus tropical (petite révision sur les habitats abordés dans l'article précédent). On suit la West Road le long d'un canal  d'eau dans lequel hérons et aigrettes de toute taille et couleur et alligators se préoccupent à peine de notre présence. On doit en fait ce canal et cette route à une compagnie pétrolière. En 1946, la Humble Oil Company (qui fait aujourd'hui partie d'Exxon-Mobil) a découvert du pétrole dans les Everglades. Pour y accéder, ils ont construit ce chemin surélevé de 12km à partir du sol extrait d'une tranchée (le canal sur notre droite). Le pétrole s'est révélé être de mauvaise qualité et Humble Oil a abandonné le projet. Mais le chemin est resté, tout comme la tranchée, qui constitue un important réservoir d'eau pendant la saison sèche. 

Il me faut un peu de temps pour apprivoiser mon vélo (qui freine en rétropédalant) et trouver mon équilibre avec mon gros objectif, le trépied, et le sac à dos... Malgré les nuages, on profite pleinement de cette matinée qui nous semble bien calme après la frénésie de la veille. On croise bien quelques touristes en vélo mais on est relativement au calme puisque la majorité choisit d'explorer Shark Valley grâce à une sorte de petit train qui passe une fois par heure. Ulysse, occupée à immortaliser le paysage, se fait surprendre par un alligator qui sort de sous la route, juste à son niveau. Les alligators ont quelques trous sous la route qui relient le canal sur notre droite et les marais d'eau douce sur notre gauche. On retrouve également notre amie la Talève violacée, occupée cette fois à grimper sur les buissons qui bordent le canal. Notre rythme lent nous fait arriver à la tour d''observation en bout de piste cyclable vers midi. L'ascension de la rampe circulaire d'accès au sommet de la tour nous fait évoluer au milieu des feuillus tropicaux à hauteur d'un de mes passereaux préférés: la paruline à collier (Northern Parula) qui résiste admirablement à toutes mes tentatives de photos. Je me console avec une petite paruline des près (Prairie warbler) et une paruline masquée (common yellowthroat). On fait une petite pause déjeuner sur le bord de la route. J'ai le plus grand mal à manger car une petite paruline à couronne rousse sautille autour de nous probablement en quête de miettes qu'on ne lui donnera pas (mauvais pour la santé des oiseaux) tandis qu'une corneille d'Amérique cherche les sacs à dos qu'un touriste imprudent aurait pu laisser sans surveillance. Ce corvidé est tellement intelligent qu'il est capable d'ouvrir les sangles de sac à dos en quête de nourriture ou d'objets brillants.

Avant de reprendre nos vélos, on s'enfonce dans un petit chemin au milieu du Hammock (feuillus tropicaux) où les aigrettes évoluent au milieux des poissons. On se rend compte en revenant sur nos pas que nous somme passé vraiment très près de deux alligators à l'aller sans même s'en apercevoir.

On reprend nos vélos pour rallier le Visitor Center par East Road qui serpente bien plus que la route du matin. Le soleil se lève petit à petit. Peu de temps après être remonté en selle, on observe deux alligators dont un immense dans une drôle de position. Sur le bord du chemin, le corps de l'un est coincé dans la machoire de l'autre. Ils ne bougent pas, parfaitement immobiles. Mais par moments le plus gros resserre sa machoire et l'autre réagit en ouvrant la gueule. Perplexes, on reste à bonne distance pour observer leur comportement pour essayer de comprendre. Les gros plans ont été pris au téléobjectif à bonne distance. Mais bientôt une vague de touristes bien moins prudents s'attroupent auprès des deux alligators. Un touriste manque de rouler sur la queue du plus grand alligator. Passablement énervés par nos congénères bipèdes qui se croient au zoo, on se remet en route sous le soleil cette fois. On s'arrête un peu plus loin car une tantale d'Amérique au bord de la route (qui n'intéresse absolument pas les touristes) m'offre enfin l'opportunité d'un beau cliché. On continue en scrutant les marais à la recherche de la spatule rosée... et on finit par en trouver... Elle se fait désirer.. La première est très loin mais aucun doute possible avec cette couleur rose caractéristique. On en trouve deux un peu plus loin, à contre-jour mais j'essaie de m'adapter aux conditions de lumières pour immortaliser cette rencontre unique. Après tout, on les trouve principalement en Floride et dans le Golfe du Mexique donc on n'est pas prêt de les revoir. On croise également une très furtive bécasse, un chevalier, des urubus à tête rouge... En prenant le temps et avec de la patience, cette journée me permet de ramener dans ma besace de photographe (ma carte SD) des photos de plusieurs oiseaux vus la veille mais dont je n'avais pas de photos convenables dont le grèbe à bec bigarré  (Pied-Billed Grebe) et le fameux Anhinga. Après 8h d'excursion, on rend nos vélos au Ranger éberlué (le prix de la location étant à l'heure, on a probablement battu un record en terme de durée de location dans les annales du Parc)! Qu'à cela ne tienne, on est content de soutenir financièrement la protection de cette biodiversité et cette journée reste probablement ma journée préférée de notre voyage (même si c'est dur de ne choisir qu'une journée). On se met en quête d'une explication pour le comportement de nos deux alligators auprès d'un ranger. L'un d'entre eux avance l'hypothèse qu'il pourrait s'agir d'un combat pour obtenir le contrôle d'un spot d'eau pour la saison sèche. On fait un dernier petit tour à pied du côté du Bobcat Boardwalk: pas de lynx (Bobcat) mais une araignée bizarre au-dessus de nos têtes. On reprend tranquillement la direction de Homestead. Pendant qu'on conduit vers l'Est, le coucher du soleil sur la rivière herbeuse des Everglades assorti d'un ciel orageux offre une belle conclusion à cette journée.

Le lendemain matin, on dit adieu à notre camping à Homestead dans le noir (c'est devenu une habitude). On se dirige à nouveau vers l'Ouest pour aller explorer les mangroves en kayak de Ten Thousand Islands. Même si le sud de la Floride a l'air très étroit, il nous faut tout de même 2h30 pour rejoindre Marco Island. On a rendez-vous à 10h avec notre guide Campbell. Notre expérience en Kayak étant relativement limitée et vu le labyrinthe que peuvent représenter les mangroves, on a préféré passer par un guide d'EcoEndeavors, une petite entreprise familiale qui semble s'efforcer de limiter l'impact du tourisme et a des partenariats avec plusieurs actions de conservation de l'environnement. Mais pour l'heure, il s'agit de trouver de quoi petit-déjeuner avant de pagayer. On trouve notre repaire pour les deux prochains jours à Empire Bagel Factory: les bagels étaient tops mais échec complet de chocolat chaud. Apparement ici, si tu demandes un chocolat chaud, tu n'as pas le droit au lait qui va avec! Sans s'étendre davantage sur ce malheureux mésentendu, on se dirige vers notre point de rendez-vous: Capri Boulevard Park. On y retrouve Campbell et nos canoés... Vu la place dans le canoé, on est contraint de faire des choix stratégiques. Je pars avec mon 70-300 mm et des jumelles. Ulysse continuera de s'occuper des photos de paysages. Je précise pour les mauvaises langues que j'avais déjà renoncé à l'idée d'amener le 600mm même si les clichés d'oiseaux au ras de l'eau me faisaient bien envie. Finalement, on ne s'aventure même pas à essayer de sortir nos appareils (photo ou portables) pendant qu'on pagaye. La première partie de notre périple se fait dans une baie relativement calme. On navigue ensuite dans un labyrinthe de mangroves qui nous amène ensuite dans Johnson Bay bien plus agitée avec des bonnes petites vagues. On pagaye jusqu'à une toute petite île qui donne sur le Golfe du Mexique. Le contraste est frappant entre cette petite île déserte aux airs de Koh-Lanta qui fait face à une langue de terre particulièrement urbanisée. Notre pause déjeuner se transforme en exploration de l'île. Le premier habitant que je croise est un Balbuzard pêcheur qui a bien pêché. Pendant qu'Ulysse part en quête de coquillages, je m'intéresse à un petit anole, et au manège des sternes royales qui se laissent tomber comme des cailloux dans l'eau pour pêcher. Quand ces oiseaux sont posés, ils agissent souvent comme de véritables girouettes: tous les individus d'une même colonie sont orientés dans le même sens faisant face au vent. Selon notre guide, cette espèce a de sérieux problèmes avec leurs ados: ils sembleraient que les adultes doivent se prosterner avant de nourrir leurs jeunes. En revenant vers nos kayaks, je croise deux autres balbuzard pêcheurs sur leur nid en plateforme, perché sur un poteau, au milieu de l'eau, à quelques mètres de la rive. Je rejoins notre guide qui nous attend avec un énorme coquillage, copie exacte de celui que j'ai trouvé pendant mon exploration. Le sien est vivant et retourne donc à l'eau après quelques explications, alors que notre coquillage géant siège maintenant fièrement à Troy. Il s'agit de Lightening whelk. Sur la dernière photo de la série ci-dessous, vous pourrez voir un mystérieux boyau qui contient les oeufs. La coquille se forme petit à petit autour de l'oeuf et va de quelques centimètres au mastodonte que j'ai trouvé. Sur le chemin du retour, on essaie de voir tortues de mers, lamantins et dauphins mais sans succès. Notre guide nous apprend que chez les dauphins, le lien le plus fort qui existe n'est pas celui de la mère et de son petit mais celui entre deux mâles copains qui passent une bonne partie de leur vie ensemble. Alors qu'on s'éloigne de la côte et qu'on se rapproche des mangroves plus denses, l'eau se colore. Elle peut carrément devenir marron par moment en raison des tannins des mangroves.

Après cette excursion en kayak, on dévore nos bagels de réserve et c'est couverts de sel qu'on se met en quête de notre AirBnb à Naples. Ce Airbnb a été élu meilleur AirBnb de notre roadtrip, super comfortable après la première semaine de camping et surtout il y a des Ferrero Rochers nous souhaitent la bienvenue. On en profite pour faire une petite pause à l'appartement, le temps d'une douche et d'un reportage photo sur Whatsapp pour nos proches (première fois qu'on a du Wifi depuis le début de notre aventure). Lorsque j'essaie de transférer mes photos de ma carte SD vers mon PC, c'est le drame. Je n'ai pas assez de mémoire sur mon PC et je n'ai pas amené mon disque dur. On se remet en route pour aller découvrir Naples. Le contraste avec la ruralité de Homestead et les quartiers populaires de Miami est frappant. Ici, le luxe règne et Naples est clairement la station Balnéaire chic du Sud de la Floride. Notre objectif pour la soirée c'est la jetée (Naples Pier)  depuis laquelle mes recherches m'indiquent qu'il est possible de voir des dauphins batifoler. Point de dauphin mains un magnifique coucher de soleil et surtout l'opportunité de voir les pélicans bruns pêcher de très près. Le spectacle de ces oiseaux imposants à l'allure de dinosaures qui se laissent tomber brutalement dans l'eau avant de réapparaitre à la surface et de filtrer l'eau à travers la poche extensible est unique. La jetée est aussi massivement utilisée par les pêcheurs et les pélicans en font souvent les frais, attrapant les poissons au bout des lignes des pêcheurs. D'ailleurs, c'est arrivé à un pélican pendant qu'on les regardait. Celui-ci a réussi à se détacher tout seul. Pour les autres, l'éducation est clé: des écrans avec des vidéos de sensibilisation indique la marche à suivre en cas d'hameçonnage d'un pélican pour tenter de limiter les cas où les pécheurs coupent simplement leurs lignes laissant les pélicans dans une bien triste situation. Toutes ces émotions nous ont creusé l'appétit et ce soir ce sera cuisine méditérranéene au Mediterrano. Après le repas, malgré la flemme qui menace de prendre le dessus, Ulysse me convainc d'aller dans le Best Buy le plus proche pour m'acheter un disque dur de secours et une carte SD extra large pour pouvoir stocker toutes les photos du voyage! 

C'est (déjà) la fin de cet article. Je vous retrouve rapidement dans les prochains pour partir explorer le territoire de la panthère de Floride et observer des bébés alligators. Prenez soin de vous!

Écrire commentaire

Commentaires: 0