Octobre-Décembre 2019: paysages dans tous leurs états

Une fois n'est pas coutume, vous verrez peu de photo animalière dans cette article pour laisser place aux paysages car les animaux se font plus rares avec l'hiver qui arrive. Je reprends mon récit mi-octobre. A Troy, cela signifie que l'hiver est à nos portes et la neige ne saurait tarder. Mais profitons encore un peu de l'automne et de ses folles couleurs tant qu'il est encore temps.

14 octobre : on se dirige vers les Adirondacks pour une petite randonnée tranquille, histoire de remuscler mes mollets et mes poumons en douceur. On commence par grimper au sommet de Mount Joe avant de redescendre autour d'Heart Lake. Après un petit casse-croûte à l'Adirondack Lodge, on rentre par les petites routes en s'arrêtant tout le temps pour essayer d'immortaliser les jeux de couleurs. On commence par un arrêt au pied des montagnes Cascade et Porter où on a crapahuté cet été pour admirer upper cascade lake et lower cascade lake. Comme je suis au copilotage, on a quelques petits échecs avec un lac dont l'accès est entièrement privé (Pyramid Lake) et des routes sans issues mais on découvre aussi quelques petits coins sympas comme Putnam Pond et le coucher du soleil le long du Lake George avec Black Mountain en arrière plan. J'en profite pour tenter quelques portraits avec les feuilles d'automne virevoltant autour d'Ulysse qui s'exécute bon gré mal gré (surtout au bout de la dixième tentative)! Fidèle à mon habitude de manger littéralement tout ce qui traîne, je m'empresse de tester les petites pommes rabougries malgré les avertissements et les moues dégoutées d'Ulysse. Conclusion: ces pommes n'étaient vraiment pas fameuses. 

19 octobre : Le week-end suivant, place à la culture. On se rend au Storm King Art Center, un immense musée d'art moderne en plein air que l'on a découvert dans la série Master of None (un petit régal cette série d'ailleurs). A mi-chemin entre Troy et New York City, l'endroit attire les New Yorkais qui enchainent selfies et codes vestimentaires audacieux devant les oeuvres. A notre arrivée à l'ouverture, le parc est déjà bien remplie et on croise une dame en train de prendre un selfie sur son vélo (sans aucune oeuvre à proximité) en émettant une série de sons pour le moins étranges. Devant l'air exaspéré d'Ulysse, difficile de ne pas pouffer de rire en pensant à la journée qui l'attend! Malgré la foule, on découvre avec beaucoup de plaisir l'artiste Mark Dion qui mêle art, naturalisme et sciences avec ses cabinets de curiosités qui nous amènent dans l'univers d'une station d'analyse environnementale, du laboratoire d'un biologiste marin ou encore l'affût d'un chasseur. Il a aussi créé une sorte de grenier rempli de boîtes à ouvrir qui regorgent d'objets anodins et insolites pour nous rappeler ce sentiment de petit explorateur quand on furetait dans les affaires de nos grands parents à la recherche de trésors oubliés. Autre moment fort de la journée qui n'a absolument rien à voir avec l'art (oups), notre rencontre avec ma première mante religieuse! Difficile de se détacher de ses grands yeux qui épient le moindre de vos mouvements. Epuisés par notre journée, on repart tranquillement vers Troy, non sans s'arrêter pour un petit goûter gourmand (Underground Coffee & Ales, Highland) et une marche digestive au-dessus du fleuve Hudson au coucher du soleil sur la passerelle qui relie Poughkeepsie à Highland. 

Au passage, octobre c'est aussi la saison des dernières compotes de pommes. On continue à faire tout plein de conserves pour se préparer à l'hiver.  

2 novembre: dernière sortie pour profiter du feuillage d'automne et pour cela on part au sud de Troy, dans les Catskills où l'hiver arrive un (tout petit peu) moins vite. On apprécie le calme et la solitude avant d'arriver à la plateforme qui permet d'admirer les Katerskills Falls. La beauté et la puissance des cascades est impressionnante surtout avec son manteau rouge automnal de feuilles. On finit cependant par fuir rapidement l'endroit envahi par les New-Yorkais (encore eux) pour parcourir un chemin de crête très agréable qui donne sur la vallée de l'Hudson et où le soleil hivernal nous chauffe de ces derniers rayons. On rencontre même une française sur la fin de notre randonnée à North Lake campsite.

Les week-ends suivants sont plus calmes avec des petites sorties locales. Le 9 novembre, je vais faire un petit tour à Albany Pine Bush Preserve où écureuils et pics s'affairent avant l'hiver. Le 12 novembre marque le début officiel de l'hiver avec les premières chutes de neige à Troy. Le week-end suivant, on se balade dans le coin de Grafton Lakes où la neige a tenu car on est un petit peu plus haut en altitude que Troy. Le 23 novembre alors qu'Ulysse s'apprête à partir escalder en extérieur, je vérifie sur mon téléphone : ô miracle, les premiers hibous des marais sont censés être là. Ni une ni deux, j'engloutie les informations en même temps que mes tartines de petit-déj. Après cette petite séquence de bibliographie (consultante un jour, consultante toujours!), j'arrête mon choix sur trois zones de prairies à 1h au nord de Troy à quelques minutes les unes des autres : Little Theater on the farm, Alfred Z. Solomon Grassland Bird Viewing area et Washington County Grassland Management area. J'embarque Kasey, une américaine passionnée de nature rencontrée depuis peu dans ma virée et nous voilà en fin d'après-midi en train de scruter poteaux, arbres morts et horizon à la recherche de mon nouveau graal. Après deux heures de recherches, point de hibou mais on ne revient pas complétement bredouilles avec une buse pattue, un faisan, une jeune buse à queue rousse et un busard saint Martin. Pas de photos cependant car aucun ne semblait d'humeur à se rapprocher de nous pour un shooting photo.

Autre expérience du moment : la culture de champignons dans la chambre d'amis. Je vous laisse imaginer les trésors de diplomatie que j'ai du déployer auprès d'Ulysse pour faire accepter mon projet. Après plusieurs semaines de négociation, j'achète un bloc de sciure de bois pré-inoculé avec des pleurotes. Alors que mes journées au travail sont particulièrement longues et éprouvantes, une de mes joies quotidiennes consiste à aller arroser mes champignons et à les voir pousser à vue d'oeil. On pouvait vraiment voir la différence entre le matin et le soir. Une semaine plus tard, on obtient une belle récolte de 1.1kg.

Le 26 novembre, on est invités chez les parents de notre amie Eliza pour fêter Thanksgiving avec leur famille. Avec une fratrie de 5, la maison est bien remplie et on se régale des petits plats préparés par Eliza et sa maman. De notre côté, on leur fait goûter le cognac de Laure et le gâteau au chocolat de ma maman (qui remportent un franc succès) pendant qu'on finit la soirée autour d'un jeu de société au coin du feu.  Pour éliminer toutes ces bonnes choses de nos popotins, on fait une petite balade sur le plateau de Rensselaer où on voit nos premier roitelets à couronne dorée ainsi que des grimpereaux. Je vais essayer d'y revenir vite pour tenter quelques photos.

 Le 1er décembre, c'est la première grosse tempête de neige de la saison. En l'espace de quelques heures à peine, notre balcon disparait sous la neige. Au milieu de ma journée de télétravail, je lance une expédition pour récupérer ma caméra (voir plus bas pour l'explication sur la caméra) enfouie sous un mètre de neige. Il me faut bien 30 minutes pour retrouver son emplacement exact mais je finis par remettre la main dessus. On se déplace en raquette dans la résidence pour mon plus grand bonheur y compris pour aller ne serait-ce que jusqu'à la mangeoire où les oiseaux attendent avec impatience un petit coup de main côté approvisionnement. D'ailleurs, j'en profite pour immortaliser quelques images de passereaux dans la neige que j'avais en tête depuis un moment. Dans notre parking qui a pris des allures de station de ski, se pose la question du déneigage de la voiture. Notre petite pelle en plastique achetée l'an passé capitule rapidement après quelques pelletées. Heureusement, un gentil voisin nous prête la sienne (on sait quel va être notre prochain investissement). Après un ou deux jours, on finit quand même par retourner au bureau. La chaine TV locale titre : "plus grosse chute de neige en une seule tempête depuis 1993 et 8ème plus grosse tempête de neige jamais enregistrée dans la région". 

C'est sous cette belle couverture neigeuse que je fête mon anniversaire. A mon réveil, un fichier PDF d'Ulysse m'attend dans ma boite mail. Ma mission: identifier les 32 espèces d'oiseaux sur les 32 photos du PDF pour récupérer un indice sur la nature de mon cadeau. Lorsqu' Ulysse se réveille, j'ai bien avancé (au lieu de bosser :/) et j'ai identifié la plupart des espèces européennes et nord-américaines. Reste quelques espèces bien plus exotiques (Afrique du Sud, Amérique du Sud) qui m'occupent une bonne partie de la soirée. 20h30: j'identifie mon dernier oiseau et m'apprête à chercher leur envergure comme demandé par Ulysse. Ce dernier dans sa grande mansuétude m'arrête en riant et me dit qu'il suffit d'utiliser la première lettre de chaque espèce pour découvrir mon cadeau: un trépied photo! un grand merci à mes parents et Ulysse pour ce très très beau cadeau et pour la chasse au trésor que j'ai presqu'autant aimé que mon cadeau!

En décembre, c'est aussi les résultats du concours photo organisée par la réserve naturelle locale (Albany Pine Bush Preserve) dont le gagnant (première place) est ... Ulysse avec sa très belle photo d'un ciel orageux. 

Dernière sortie avant les vacances dans en Floride: une randonnée dans Keene Valley dans le Nord des Adirondacks. Je pars à l'assaut de la montagne Rooster Comb peu rassurée par les -10°C de température extérieure. Ma dernière randonnée dans la neige l'an passé m'a un petit peu vacciné avec des sensations de froid vraiment pas terribles au sommet (du genre, je ne sens plus mes doigts, du tout, du tout). Après un essai avec les raquettes, on abandonne vite l'idée car ça nous ralentit beaucoup. De mon côté, je fais un essai décisif pour les prochaines sorties hivernales: je troque mes chaussures de rando basses contre la paire de bottes achetée cet été pour aller vadrouiller dans les marécages (oui, les ornitho ont des façons bizarres d'occuper leur dimanche). On atteint sans encombre le premier sommet Rooster Comb qui nous offre une vue époustouflante. Sur le retour, on décide de faire un petit détour par un autre sommet Snow Mountain. Sur le retour, alors qu'on descend allègrement dans la poudreuse de Snow Mountain, Ulysse me prévient en traversant un petit cours d'eau qu'il est passé au travers de la couche de glace. Mais pas d'inquiétude, me dit-il, ce n'est pas bien profond. Mise en confiance par les performances passées de mes bottes, je m'aventure sans peur sur la couche de glace, les bras tendus telle une équilibriste, en m'exclamant " Je suis légère comme l'air"...  A ces mots, la glace se fend sous mon poids (apparement supérieur à celui de l'air), mon pied passe au travers, je tombe à genoux, puis finis la tête dans la neige... Relevant la tête, je juge bon d'informer Ulysse que c'est profond et froid pendant que ma botte s'emplit d'eau et que, comble du ridicule, mon cache-oreilles décide de cacher ... mes yeux. Je finis par m'extirper tant bien que mal de ce traquenard en poussant quelques cris bien aigus censés refléter le froid ressenti par mes pauvres pieds. Heureusement, pendant qu'on continue notre descente, mes bottes finissent par agir comme une combinaison néoprène réchauffant progressivement l'eau au contact de ma peau... On finit la descente en rigolant: descendre la montagne n'est jamais aussi drôle que dans la poudreuse qui amortit chacun de nos sauts. Notre GPS de randonnée pose le verdict en rentrant à la maison : 10km et quasi 1000m de dénivelé. Pas mal pour la première randonnée hivernale de la saison. 

On finit cette super journée avec Eliza et Sebastian ainsi qu'Hélène et Cyrus pour une crêpe party d'anniversaire. Le lendemain, on continue de tirer parti de la couche de neige impressionnante avec une session luge dans notre résidence. Un grand merci à Hélène et Cyrus pour ces beaux souvenirs. Après un petit détour par le traditionnel Victorian stroll de Troy (festival où les gens se déguisent en costumes d'époque victorienne), il est temps de dire au revoir à Hélène et Cyrus et d'essayer de faire sécher nos vêtements.

Pour finir cet article, je vous amène dans la neige à côté de notre résidence pour trouver des empreintes d'animaux. Saurez-vous retrouver qui est passé par là? 

Je vous donne quelques indices. Juste avant de quitter la France, j'ai acheté une caméra à détection de mouvement pour faire du repérage pour la photo animalière en particulier de mammifères. Il s'agit d'une caméra que je peux laisser dehors pendant une semaine (ou plus). A chaque fois qu'elle détecte un mouvement, elle enregistre une vidéo. L'objectif, c'est de savoir s'il y a certains mammifères dans certains endroits et de connaitre les heures à laquelle ils sortent pour pouvoir être là au bon moment après pour les observer et peut-être les photographier. J'ai commencé par poster ma caméra dans le petit bois adjacent à notre appartement qui donne sur un champ et sur un petit étang. Cette juxtaposition de différent habitats est souvent prometteuse en termes de vie sauvage. Chaque semaine, aller récupérer les données et les découvrir sur le PC me rappelle mon impatience, quand ado, je rentrais à la maison après les vacances et ma première pensée était pour la boîte aux lettres et ces trésors de cartes postales. Résultat des courses : après plusieurs semaines, j'ai pu confirmer que le petit bois à côté de chez nous abrite une multitude de bêtes. Coyotes, renard gris et peut-être roux, beaucoup d'écureuils et de cerfs (y compris des mâles avec leurs bois qu'on avait jamais vu en journée), lapins, dindes sauvages et des hordes de corbeaux, ratons-laveurs, mouffettes rayées, et même un pékan (grosse martre appelée Fisher cat en anglais). 

Je vous dis à très bientôt. Mon prochain article vous amènera en Floride!